La Courtoisie insurgée |
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Dans la tourmente (1222-1249) |
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A la mort de Raimon VI, Cardenal poursuit son activité au service de Raimon VII et ce, jusqu'à la mort de ce dernier en 1249. Dans le sirventès XV "Ben volgra, si Dieus o volgués" par un type de jeu de mots fréquent à l'époque, Raimon VII devient le "rai-mon", le rayon éclairant le monde. Dans ce même sirventès il est dit du jeune comte que " tout comme l'eau sort de la fontaine, de lui naît chevalerie". Comme de nombreux "Toulousains" Cardenal considère le "comte jeune" comme le dernier rempart contre le déchaînement de violence que subit l'Occitanie méridionale. La satire contre les ordres religieux
est toujours aussi vive au cours de cette période. Comment pourrait-il
en être autrement alors que l'Inquisition sévit chaque jour
un peu plus ? Daté de vers 1240 le sirventès XLVII-Clergía non valc anc mais tan est peut-être celui qui résume le mieux l'état d'esprit de Cardenal devant les bouleversements qui ont eu lieu, établissant le plus triste état du monde qui soit, véritable catalogue de ce qui ne va pas ou plutôt ne va plus. Y sont tour à tour attaqués en effet : le clergé, les chevaliers, les dames, les vilains et ... les lois. Cardenal, et bien d'autres avec lui, se sent rejeté par la nouvelle société des puissants. Il est cependant assuré d'être dans le vrai contre eux et par conséquent refuse de "pactiser". Sa contestation est, comme toujours intransigeante et l'ampleur des événements ne fera que la renforcer. Au cours de ces années terribles Cardenal approfondit sa réflexion spirituelle et se prend même à interpeller Dieu lui-même . Ses "dialogues avec Dieu" sont souvent considérés comme des sommets de la littérature médiévale:
* Certains conjecturent qu'il s'est marié
au cours de cette période, vers 1230 (il avait alors la cinquantaine)
et qu'il a eu (au moins) deux fils. La démonstration en est bien
ténue et ne repose que sur l'interprétation de l'emploi
de certaines expressions dans les deux sirventès suivants: On peut très bien considérer
que si la première sous-entend bien qu'il était célibataire,
la seconde peut très bien n'être qu'une formule voulant dire
"l'homme et les enfants de l'homme" comme le pense Charles Camproux
( voir sa note de "Un sirventes novel..." dans les "Tròces
causits".) Cependant on retrouve peut-être
trace de ce qui pourrait être sa descendance à Montpellier.
En effet, les archives mentionnent , en 1292, un Pierre Cardinal professeur
" ès-droicts " à l'Université de cette ville. Ce Pierre Cardinal,
s'il ne s'agit pas d'une simple homonymie de patronyme, aurait fort bien
pu être un fils ou un petit-fils du poète. * Pèire Cardenal a été
autrefois considéré comme ayant pu être l'auteur de
la seconde partie de la Canso dont la deuxième partie, celle qui
est la plus "patriotique", commence à être rédigée
dans cette période (1228). Cette hypothèse est actuellement
rejetée par la plupart des chercheurs. * D'autres ont aussi supposé Pèire Cardenal cathare ou en tout cas proche des idées cathares. A tort semble-t-il mais il est certain qu'il a de nombreux points de contact avec eux. Leur rigorisme devait plaire à son esprit doctrinaire. Comme eux il déteste le relâchement dans la pénitence et la vénalité du pardon de l'église. Il pourrait aussi avoir été inspiré par les Vaudois (déclaration sur les serments inutiles) . Sa gravité morale le rapproche surtout de tous ceux qui s'efforcent alors à une rénovation religieuse "pauvres catholiques", franciscains... A vrai dire ce sont plutôt les cathares ou les Vaudois qui auraient pu se réclamer de lui, que lui d'eux . En tout cas il était bien dans le caractère d'un homme d'oc, ouvert à de multiples influences de déclarer hautement " Je veux avoir parole de sarrasin, foi et loi de chrétien, subtilité de païen et hardiesse de tartare." . ( sirventès XXII )
* Comme il l'a toujours fait, Pèire Cardenal voyage en dehors de Toulouse, outre les déplacements réguliers en Velay dont nous avons déjà parlé, on trouve trace, dans les pièces de cette période, de rapports privilégiés avec d'autres seigneurs que Raimon VII et différents de ceux de la période précédente:
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